Depuis quelques
jours, l’actrice, Madame Anny Duperey, devient le chef de file de la lutte
contre la nouvelle formule du LÉVOTHYROX® (lévothyroxine). De son côté, le
chanteur Stromae est présenté comme une victime des effets indésirables du
LARIAM®(méfloquine).
Le médicament, ne
pouvant échapper à son environnement, serait-il entré dans l’ère de la
pharmacologie VIP (Very Important Person) ?
La situation
actuelle amène à s’interroger sur l’interaction entre les différentes
dimensions de la pharmacologie : pharmacologie fondamentale, pharmacologie
clinique, pharmacologie boursière et pharmacologie sociale, notamment. Au lieu
d’être complémentaires, celles-ci semblent s’opposer. Serait-ce un choc des
pharmacologies ?
La pharmacologie
VIP pourrait être la dernière étape de la pharmacologie sociale. Les stars de
la télévision et de la radio imprimeraient une étiquette toute particulière à
l’alerte sanitaire. Face aux épidémies des alertes, notées notamment en France,
l’intervention d’une star, touchée par des effets indésirables d’un médicament,
rend l’alerte plus visible voire plus audible. La composante médiatique vient
amplifier ce phénomène.
Cette amplification
aboutit à un constat : le risque de noyer et de polluer le système
d’alertes. D’ailleurs, l’ANSM (agence nationale de sécurité du médicament)
aurait reçu près de 9000 signalements d’effets indésirables présumés liés à la
nouvelle composition du LÉVOTHYROX® (lévothyroxine). L’analyse sérieuse d’un
seul cas nécessite un temps non négligeable. L’étude de ces 9000 signalements
sera-t-elle d’une bonne qualité ?
Certains
responsables de centres régionaux de pharmacovigilance commencent à revoir leur
position sur la nouvelle plateforme du Ministère de la santé. Dès le mois de
juin 2017, nous avons pourtant donné l’alerte sur le caractère inutile,
nuisible et coûteux de ce portail de signalement ouvert à tous. « « C’est clair, avec cette affaire, il
va falloir retravailler le portail » remarque un responsable de centre
de pharmacovigilance, pourtant initialement favorable au dispositif »
selon un article du JIM (journal international de médecine) publié le 6
septembre 2017.
Le JIM précise que
« la crise met en lumière le débordement des centres de pharmacovigilance,
notamment depuis la mise en place d’un site internet permettant aux patients de
déclarer directement des effets indésirables (…) » ; un débordement
« également évoqué par le patron de l’ANSM ».
Le 11 septembre
2017, un autre média (France bleu) titre « Levothyrox : le centre de
pharmacovigilance de Limoges croule sous les signalements » en notant que
« le problème, c’est que les déclarations sont souvent très évasives et
les patients apportent rarement les compléments d’informations
nécessaires ».
Remarquons que dans
cette affaire du LÉVOTHYROX®, les génériques semblent maintenant désirés alors
que souvent, sur la place publique, les génériques ont été stigmatisés.
Les alertes données
par des professionnels de santé et par des patients non représentés par une
célébrité, elles, semblent recueillir une plus faible attention. Du moins,
elles ne semblent pas être traitées avec la même célérité observée dans ces
affaires médiatisées qui tournent en boucle. Il faut dire que le thermomètre
médical pèserait, peut-être, peu face au baromètre médiatique.
Ce dialogue de
sourds pourrait durer.
Certains
« savants » raisonnent de façon générale en se fondant sur la notion
de significativité statistique et veulent imposer la même recette à l’ensemble
de la population. Face à eux, certains « consommateurs » réclament la
prise en compte de leurs spécificités individuelles et refusent d’être sacrifiés
au nom de cette généralisation d’un remède unique et de cette homogénéisation
des corps humains. Ces patients allant même jusqu’à réclamer la suppression
d’un médicament qui, s’il est certes nocifs pour eux, peut pourtant apporter un
bénéfice chez d’autres patients.
Ce ménage à
plusieurs, ce désaccord, traduirait un appel à la communication entre les
différents acteurs concernés.
C’est surtout une
nouvelle invitation à la prise en considération des variations inter- et
intra-individuelles lors de cette rencontre singulière, entre le soignant et le
patient, qui conduit à la décision thérapeutique : à la prescription de
tel ou tel médicament ; et, ne l’oublions pas, parfois, à sa
dé-prescription.
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