Le 8 février 2018, l’ANSM (agence nationale de sécurité du médicament)
vient confirmer le bien-fondé de nos deux précédentes publications ainsi
libellées :
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Cancérologie. Le 5-FU et le déficit enzymatique : Éviter des toxicités mortelles et réduire les coûts de prise en charge
par le dépistage avant la mise sous traitement. Par Madame le docteur Michèle
BOISDRON-CELLE, ICO site Paul Papin (21 septembre 2017) ;
-
Décès sous l’anticancéreux 5-FU :
un bilan sur 10 ans de la pharmacovigilance confirme l’analyse du Docteur
Michèle BOISDRON-CELLE (19 janvier 2018).
Le point d’information de l’ANSM, du 8 février
2018, est ainsi intitulé : « Prévention
des effets indésirables graves liés à un déficit en dihydropyrimidine
déshydrogénase (DPD) lors de traitement par fluoropyrimidines (5-fluorouracile
et capécitabine). Il confirme l'analyse proposée dans nos précédentes publications. Mais l’ANSM
semble être en « attente d’une position consensuelle au niveau européen ».
L’aboutissement des « discussions sur le plan national et européen » est prévu « courant 2018 ».
Toutefois, une procédure mise en oeuvre par l’ANSM est, pour le moins, surprenante. L'ANSM précise qu’« en cas de survenue d’une
intoxication » à ces médicaments, il « est rappelé qu’il existe un antidote,
Vistogard (uridine triacétate) qui dispose depuis 2015 d’une AMM [autorisation de mise sur le marché] aux Etats-Unis. L’utilisation en France est possible au
travers d’une ATU [autorisation temporaire d’utilisation] nominative octroyée
par l’ANSM ».
Obtention de cet antidote par le pharmacien d'un établissement de santé :
cette procédure d’ATU nominative est
inappropriée à une situation d’urgence vitale
En effet, cette procédure exceptionnelle, dérogatoire, permet l’accès à
des médicaments qui n’ont pas d’AMM en France. Elle est délivrée par l’ANSM dans
des situations qui n’enregistrent aucune alternative thérapeutique (maladies
rares, etc.). Ces médicaments ne peuvent être dispensés que par les pharmacies
à usage intérieur (PUI) des établissements de santé.
Or, ces médicaments ne peuvent être
obtenus qu’après un délai de quelques jours. La pharmacie d’un
établissement de santé ne peut disposer
d’un stock à l’avance. Ce qui semble incompatible,
inadapté, avec le besoin urgent d'un antidote. Ce dernier doit être disponible, avant la survenue d'une intoxication, dans une armoire d’urgence pour pouvoir le mobiliser dans une situation d’urgence vitale où chaque minute pourrait compter.
Comme son nom l’indique, il s’agit d’une ATU nominative. Elle est délivrée pour un seul malade nommément désigné,
à la demande et sous la responsabilité du médecin prescripteur. Ce qui signifie
que le malade a déjà présenté le trouble (intoxication) pour lequel cette ATU
est sollicitée. En pratique, le médecin remplit un formulaire bien précis et le
transmet au pharmacien de l’établissement de santé. À son tour, ce pharmacien adresse
ce formulaire renseigné à l’ANSM. Celle-ci instruit le dossier et délivre
éventuellement cette ATU nominative pour une durée limitée. Sans l’obtention de
cette autorisation de l’ANSM, le pharmacien ne peut obtenir le produit auprès
du laboratoire pharmaceutique. Le pharmacien adresse donc au fabricant deux
éléments obligatoires : la commande du médicament accompagnée de cette ATU
nominative. Ce n’est qu’à cette condition que le médicament peut alors être livré
à la pharmacie au bout d’un certain délai. Au total, il faut quelques jours avant la livraison du médicament à la
pharmacie qui peut alors le dispenser au service de soins dans lequel est hospitalisé
le patient. Cette procédure est donc
inadaptée à l’approvisionnement d’un
médicament utilisé comme un antidote.
Car, ce dernier est censé contrer, en
urgence, l’effet d’un toxique.
Obtention de cet antidote par le pharmacien d'un établissement de santé :
à défaut d’une AMM, une ATU de cohorte semble plus appropriée à l’urgence vitale
Une ATU de cohorte concerne un groupe ou sous-groupe de patients qui
sont traités et surveillés suivant des critères définis dans un protocole d’utilisation
thérapeutique (PTU). Contrairement à l’ATU nominative, elle est délivrée à la
demande du titulaire des droits d’exploitation (le fabricant, et non le médecin)
qui s’engage à déposer une demande d’AMM dans un délai fixé.
Cette ATU de cohorte, elle, permet
à la pharmacie d’un établissement de santé de disposer d’un stock à l’avance. Elle semble mieux
adaptée à un médicament jouant le rôle d’un antidote. Dans l’attente d’obtention
d’une AMM.
Enfin, pour quelle raison cet antidote n’a toujours pas une AMM en France ?
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