samedi 8 avril 2017

Alerte sur les Médicaments Dérivés du Sang (MDS) : vers un nouveau scandale sanitaire ?


Des médicaments importés moins contrôlés…

Une concurrence déloyale, avec des multinationales privées étrangères, mettant en difficulté un laboratoire national français entièrement public ; conséquence d’une directive européenne « médicament »…

Les hôpitaux français ont pourtant le pouvoir de choisir...

 


Un message m’informe d’une « rupture » de stock « nationale » de certains médicaments dérivés du sang (MDS) dont la TEGELINE®.

Cette rupture « peut durer quelques mois » selon ce message.

La TEGELINE® est commercialisée par le Laboratoire de Fractionnement et des Biotechnologies (LFB) : société anonyme détenue à 100% par l’État.

Cette situation préoccupante s’expliquerait par notamment les faits suivants :

Années 2016-2017 : le laboratoire LFB épinglé par une inspection inopinée de l’agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) : Injonction N°16MB134-INJ

Selon un document daté du 26 janvier 2017, une « inspection inopinée » de la société LFB BIOMEDICAMENTS effectuée du 07 au 10 novembre 2016 par des inspecteurs de l’ANSM a mis en évidence « des non-conformités et manquements importants ». Les réponses apportées par le laboratoire ont été jugées non satisfaisantes par l’ANSM qui relève :

1.  Des insuffisances du système qualité pharmaceutique ;

2.  Des non-conformités aux AMM (autorisations de mise sur le marché) et aux BPF (bonnes pratiques de fabrication) des opérations pharmaceutiques de production ;

3.  Des non-conformités aux dossiers d’AMM des opérations de contrôle pour l’ensemble des produits fabriqués, relatives à l’absence de réalisation du test de stérilité dans le cadre des études de stabilité à péremption.

D’où l’injonction portant sur cet établissement et prise en application du code de la santé publique.

Années 2012-2013-2014 : Madame la Ministre des Affaires Sociales et de la Santé interpellée par l’Assemblée Nationale et le Sénat sur la situation : Concurrence avec des Laboratoires étrangers

Sénat : alertes du 13 décembre 2012 et du 22 mai 2014

« situation inquiétante du (…) LFB pour la production de médicaments dérivés du sang (MDS) destinés aux établissements hospitaliers français (…) soumis aux règles d’appel d’offres des hôpitaux et sont donc en concurrence avec ceux des laboratoires étrangers. Ces derniers ne sont pas soumis aux mêmes règles que le LFB pour l’obligation de déclaration des suspicions de maladie de Creutzfeldt-Jacob sporadique (MCJs) qui font, en France, l’objet de retrait de lots par le LFB (…) pèseront à terme sur les emplois… » (M. Didier Guillaume)

« (…) mettant à mal l’avenir de cet établissement public, face à la concurrence de multinationales (… » (Mme Laurence Cohen)

Alors qu’en 2013, « le Premier ministre a demandé à M. Olivier Véran, député de l’Isère, de conduire une mission chargée de réexaminer de manière globale la filière sang en associant les parties prenantes à cette réflexion », Mme Laurence Cohen fait remarquer qu’en « juillet 2013, le député Olivier Véran a rendu public son rapport sur la filière du sang en émettant des recommandations importantes allant dans le sens d’un renforcement du service public de la transfusion » et qu’« à ce jour, aucune n’a été prise en compte ».

Assemblée Nationale : alertes du 05 février 2013 et du 04 mars 2014

« M. André Chassaigne attire l’attention de Mme la ministre (…) sur les contradictions en matière de sécurité des médicaments dérivés du sang et ses conséquences pour les patients et le Laboratoire français des biotechnologies (…) LFB, qui est entièrement public, produit la moitié des MDS, le complément étant importé. Or ces MDS importés ne sont pas soumis aux mêmes exigences éthiques et de sécurité que ceux élaborés par le LFB (…) concurrence déloyale de la part des multinationales concurrentes (…) De ce fait, le LFB connaît des difficultés financières graves, entrainant la suppression de nombreux emplois de recherche et développement et une réduction importante des investissements industriels (…) En conséquence (…) comme l’a recommandé en 2010 l’inspection générale des affaires sociales (…) »

« M. Martial Saddier attire l’attention de Mme la ministre (…) sur les difficultés rencontrées par le Laboratoire LFB (…) est ainsi soumis à la concurrence des multinationales privées étrangères qui cassent les prix en France (…) »

Réponses de la Ministre des Affaires Sociales et de la Santé, en date du 8 août 2013, du 12 février 2015, du 26 mars 2013 et du 17 février 2015

Le texte de ces réponses est quasiment le même. À lire absolument… Voici un extrait :

 « (…) La fabrication et la commercialisation des médicaments dérivés du sang sont prévues par la directive « médicaments ». Dans ce cadre, le système d’autorisation de mise sur le marché (AMM) européen s’applique et la France ne peut s’opposer à l’entrée sur son territoire de MDS étrangers. Aujourd’hui, les situations de l’EFS [établissement français du sang] et du LBF sont impactées par la politique des retraits de lots menée en France qui est actuellement l’une des plus strictes en cas de suspicion de maladie de Creutzfeld-Jacob (MCJ) sporadique au nom du principe de précaution. De fait, les autres pays de l’UE n’appliquent pas une telle politique à leur plasma. Ce retrait s’applique donc aux seuls produits issus du plasma français et, de ce fait, a des conséquences sur l’EFS et le LFB mais pas sur les collecteurs ou les fractionneurs étrangers. Par ailleurs, dans le domaine des médicaments dérivés du sang, le LFB a progressivement perdu auprès des hôpitaux français des parts de marché face à des laboratoires étrangers du fait d’une moindre compétitivité de ses prix. Les hôpitaux français sont en effet soumis au code des marchés publics et ne peuvent favoriser le LFB en tant que tel (…) ».

Mais...
 
Pardon de vous contredire Madame La Ministre, Madame et Monsieur Le Député ou Sénateur : le code des marchés publics n’impose pas aux hôpitaux publics le choix d’un médicament de moindre qualité

Dans le cadre des marchés publics, le premier critère pris en considération est celui du rapport bénéfice / risque d’un médicament. Le critère du prix est secondaire. Ce dernier n’entre en jeu que lorsque les produits, mis en concurrence, présentent une qualité identique.

Un hôpital français a donc, non seulement la possibilité mais également, l’obligation de choisir le médicament le mieux contrôlé.

Il doit raisonner en « mieux disant » et non pas en « moins disant »…

Comme cela est expliqué dans le livre « Médicament : recadrage. Sans ton pharmacien, t’es mort ! » l’hôpital est « obligé de faire un tri parmi tous ces médicaments (…) Seuls les médicaments présentant un rapport bénéfice / risque réellement éprouvé doivent pouvoir, théoriquement, « rentrer » à l’hôpital. Ils sont référencés dans un livret appelé « livret du médicament » (…) Ce référencement (…) influe directement sur la procédure relative aux marchés publics. »

Ce livre indique aussi que « jusqu’à un certain temps, l’élaboration de ce livret revenait à la commission du médicament. La composition de celle-ci était définie par voie réglementaire. Elle était composée par notamment des praticiens venant de diverses spécialités. La direction de l’hôpital y siégeait (…) C’est elle qui était chargée d’effectuer ce tri entre les médicaments. Comme un vigile à l’entrée d’une boîte de nuit si je puis m’exprimer ainsi. Elle jouait ainsi le rôle d’un filtre. Qui, parfois, pouvait être percé ! (…) C’est dire la position stratégique d’une telle commission. Et celle-ci n’était pas à l’abri de quelques conflits d’intérêts. Depuis le décret n°2010-1029 du 30 août 2010 relatif à la politique du médicament dans les établissements de santé [décret d’application de la loi HPST (hôpital, patients, santé, territoires) du 21 juillet 2009, dite loi BACHELOT], les conditions de gestion du bon usage des médicaments, notamment, ont été modifiées. La commission médicale d’établissement se voit, désormais, confier les missions de la commission du médicament (…). »


Les patients concernés auraient-ils été informés ?






 

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